Défis économique et monétaire face à l’inflation

Macroéconomie, géopolitique, inflation, montée des taux, « yo-yo » boursier, les sujets ne manquent pas pour animer l’actualité et les marchés financiers depuis le début de l’année. Ce dernier trimestre particulièrement, apparait comme la confirmation de certaines problématiques qui semblaient encore transitoires il y a quelques mois, s’inscrivant aujourd’hui comme les points d’attentions majeurs des agents économiques et des investisseurs.

Croissance, stagnation ou récession ?

Sur un plan macro et micro économique, le tableau n’est pas si noir. Si la tendance générale penche vers un ralentissement de la croissance mondiale et des révisions à la baisse de celle-ci pour les 2 prochaines années, le phénomène d’une récession durable n’est toutefois pas entièrement généralisé à l’ensemble des zones géographiques. En effet, aux Etats-Unis, les publications montrent clairement un fléchissement de l’activité avec un cycle qui semble être arrivé à maturité. Toutefois, il convient d’observer que le marché du travail se porte très bien avec une situation de quasi plein emploi, des ventes au détail de bonne facture, de moindres tensions sur les chaines d’approvisionnement et une confiance importante des consommateurs. Du côté des entreprises, notons que 52% d’entre elles ont publié des résultats au-dessus des attentes. En Europe, le constat est différent : même si la France et l’Allemagne en moindre mesure semblent tenir le cap, nous entamons un second mois consécutif de contraction de l’activité. Le manque d’autonomie énergétique de la zone et le moral des ménages, géographiquement proches du conflit en Ukraine sont bien évidemment des éléments importants à surveiller. Côté micro, 72% des sociétés ont annoncé un chiffre d’affaires meilleur qu’anticipé et 49% ont dépassé les attentes sur les bénéfices. Soyons toutefois prudents face aux coûts d’exploitation plus importants et à la faiblesse de l’euro pouvant faire peser un risque sur les marges. Enfin, en Chine, la situation est tout à fait à part : en raison d’une politique zéro-covid toujours très présente, faisant planer des risques de reconfinement, une demande internationale plus mesurée et de nombreux défis ESG, l’activité n’a pas repris à plein régime et la croissance tourne donc au ralenti. Cependant, le gouvernement chinois disposant de bien plus de manœuvre qu’en Europe et qu’aux USA pour soutenir l’activité du pays, la Chine apparait comme l’une des zones offrant le plus de visibilité à moyen/long terme.

 

Des banques centrales en guerre contre l’inflation

Il s’agit là d’une des missions principales des banques centrales : assurer la stabilité des prix, c’est-à-dire maintenir l’inflation à un niveau acceptable. Et depuis quelques mois, les banques centrales ont fort à faire sur ce terrain. Que ce soit outre-Atlantique ou en Europe, si nous pensions en début d’exercice 2022 qu’elle serait transitoire, l’inflation est finalement bel et bien installée et de manière plus durable que nous l’avions imaginé, au point de devenir à ce jour LE point d’attention n°1 des instances de régulation mais aussi et surtout des investisseurs. A l’heure actuelle, l’inflation se situe à un niveau d’environ 7 à 8% pour les deux zones. En revanche, sa nature est divergente : aux Etats-Unis, l’inflation est « domestique » et résulte de la demande (le cycle économique est mature et l’inflation s’accompagne d’une hausse des salaires) tandis qu’en Europe, elle est également « importée » et donc expliquée par la hausse des prix de l’énergie en raison du conflit ukrainien. La question énergétique, qu’il s’agisse de son approvisionnement ou de son coût, apparait d’ailleurs aujourd’hui comme un élément central des préoccupations tant des entreprises et des ménages que des marchés et des investisseurs.

Quelle qu’en soit la cause, les banques centrales (FED et BCE) ont fait de la lutte contre l’inflation leur priorité absolue : les prises de paroles des gouverneurs et des membres de ces deux instances se multiplient, tous indiquant une ligne de conduite claire en faveur d’un durcissement des politiques monétaires, quitte à pénaliser la croissance. Et aux paroles, se sont récemment ajoutés les actes : après une timide hausse de 0,25 point en mars, puis 0,5 point en mai, la FED a procédé à deux nouvelles remontées de taux de 0,75 point chacune en juin et en juillet, portant le taux directeur américain entre 2,25% et 2,50%. En Europe, après plusieurs spéculations sur la capacité de Christine Lagarde à le faire, la BCE a finalement opté le 8 septembre dernier pour une remontée de son taux directeur de 0,75 point, désormais porté à 1,25%, un signal très fort de normalisation monétaire. Ce constat est d’ailleurs similaire aux quatre coins du globe avec des resserrements observés en Corée du Sud, Australie, Indonésie, Brésil, ou Royaume-Uni. Parmi les acteurs importants, seules la Chine et le Japon naviguent à contre-courant avec une volonté d’assouplir leurs politiques de taux, en raison d’une inflation bien mieux maitrisée.

 

Quelles conséquences et perspectives pour les marchés financiers ?

Alors que le mois de juillet et la première quinzaine d’août ont vu les marchés actions rebondir assez significativement, les banques centrales ont douché les velléités des investisseurs dont l’optimisme étaient exagéré. L’ensemble des problématiques animant l’actualité semblent être aujourd’hui intégrées même si la visibilité sur l’évolution de ces sujets est très restreinte et fera assurément naître de la volatilité dans les prochains mois. Du côté du marché action, les corrections de la fin de l’été ont fait naître des points d’entrée sur le marché européen qui peuvent être intéressants à long terme, à condition de faire preuve encore une fois de sélectivité en termes de secteurs et de thématiques d’investissement. Aux Etats-Unis, le marché est plus cher mais l’éloignement géographique avec le conflit ukrainien et la crédibilité des actions de la FED au regard du cycle économique laissent penser que la zone apparait toujours intéressante pour de l’épargne de long terme également. Enfin, l’indépendance de certains pays émergents et de la Chine, notamment face aux sujets d’inflation, de politique monétaire et de craintes de récession durable, fait de cette zone géographique une poche de diversification pertinente. Une fois n’est pas coutume, le marché obligataire revient (enfin) sur le devant de la scène avec des nouvelles émissions bénéficiant de rendement plus intéressant grâce à la hausse des taux, notamment sur le segment du « high-yield », encore faut-il être vigilant sur le choix de l’émetteur.

De manière plus globale, nous privilégions de la prudence à court terme tant que la question de l’inflation ne sera pas totalement maitrisée. Les diverses actions à venir des banques centrales seront déterminantes mais seront susceptibles d’entrainer des replis des actifs risqués. En revanche, toute accalmie sur le front inflationniste pourrait amener une reprise forte et franche des marchés. Dans une optique long terme, nous conseillons de profiter de manière graduelle des opportunités, tout en continuant de privilégier les sociétés de croissance et de qualité, les thématiques porteuses (eau, énergies renouvelables, infrastructures, …) ou encore les fonds de performance absolue offrant une décorrélation aux grandes tendances boursières.

 

Pour plus d’informations, nous vous invitons à nous contacter.

 

Article rédigé par Marie BACANU, Responsable Gestion Financière

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